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La reprise du service par les entreprises industrielles n'est pas du même goût pour tout le monde

23 juin 2020 Libération

La reprise des activités industrielles est en cours, mais qu’en est-il de l’application des guides de mesures sanitaires du ministère de tutelle destinés à assurer le redémarrage des activités de nos entreprises sans risque pour la santé de leur personnel ?

« La mise en œuvre de ces mesures est aujourd’hui une contrainte plus qu’autre chose puisqu’elle coûte de l’argent, de l’énergie et beaucoup de temps de travail », nous a confié sous le seau de l’anonymat le responsable logistique d’une entreprise casablancaise spécialisée dans la fabrication des chaussures. Et de poursuivre : « Selon ces guides, les entreprises sont engagées à assurer la distribution d'équipements de protection sanitaire (masques, gel hydroalcoolique...) et à garantir la disponibilité des produits d'hygiène (savon, lingettes, produits désinfectants, essuie-mains, poubelles). Elles sont également appelées à désigner un référent par shift dont le rôle est de s’assurer que les règles de sécurité et d’hygiène sont effectivement respectées. Ces mesures coûtent près de 60.000 DH par semaine sans compter le fait qu’on a embauché quatre femmes de ménage. Nous avons noté également la surconsommation de ces produits d’hygiène par nos salariés, ce qui représente des charges supplémentaires ».

Notre source pointe également du doigt les mesures destinées à aménager les zones de repos, les réfectoires et les zones fumeurs pour faire respecter les distances (marquage au sol), à organiser de manière fluide la distribution des repas à l’intérieur des lieux de restauration, à fractionner les pauses et les heures des repas entre les employés afin de réduire les croisements et la promiscuité dans la cantine et le nombre de pauses.
Les entreprises sont également appelées à faire nettoyer en priorité et avec des produits homologués les surfaces à fort contact (tourniquets, ascenseurs, toilettes, robinets, poignées de porte, télécommandes, barres d’escalier, poubelles) et de respecter le temps d’action et de séchage préconisé pour que ces produits agissent. « Le coût total des travaux d’aménagement s’est élevé à 1 million de DH alors que nos cahiers de commandes sont vides et que nos trésoreries se réduisent comme peau de chagrin », nous a précisé notre interlocuteur.

Concernant le transport du personnel qui doit, de son côté, être réorganisé pour respecter les dispositions nécessaires, notre source nous a précisé que cette question s’est transformée en véritable fardeau financier pour son entreprise. « La plupart de nos salariés résident à Mohammédia et sont obligés d’emprunter quotidiennement un autocar pour 20 DH par place, contexte deCovid-19 oblige. Nous en tant qu’entreprise, nous payons un supplément de 5 DH pour chaque salarié et nous prenons en charge les frais d’alimentation des conducteurs de ces autocars afin de garantir la continuité du travail au sein de nos locaux sachant qu’on fonctionne avec moins de 30% de notre effectif », nous a indiqué notre source.

Pour ce cadre casablancais, l’Etat a imposé de nouvelles conditions de travail difficiles à respecter à la lettre, d’autant plus qu’il impose de nouvelles charges financières dans un contexte de morosité économique. « Exiger de telles conditions dans un climat de récession est inconcevable notamment pour des entreprises dont l’activité se base sur l’export. Notre entreprise fonctionne aujourd’hui grâce aux commandes signées avant la propagation du Covid-19 et nos donneurs d’ordre hésitent aujourd’hui à passer de nouvelles commandes », nous a-t-il confié. Et de conclure : « Ces conditions nouvelles ont également perturbé le fonctionnement du travail au sein de notre entreprise puisque le personnel administratif doit rejoindre son poste deux ou trois heures avant les heures habituelles de travail et ne le quitter qu’une heure ou deux après la fin de celui-ci. Ces administratifs sont aussi appelés à effectuer d’autres tâches qui ne correspondent pas à leur mission initiale alors qu’ils risquent des réductions de leurs salaires ou de perdre leur emploi si la récession perdure ».

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